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L’œuvre Pour les curieux

Claude Andral, Artiste peintre

Si ma seconde carrière de peintre est tardive, les dispositions sont précoces. Indélébiles mêmes, mes premiers souvenirs, âgé de 5 ans : La salle à manger à peine éclairée de 2 maigres fenêtres sur fond de cour. Devant l’une, ma mère brodait, à l’autre, papa au chevalet… c’était donc dimanche. Â« Quand je serais grand, je serais peintre Â» ai-je déclaré. Et çà ne m’a jamais quitté. Ma mère m’a répété que j’avais dit : dessinateur, parce que rapin lui a fait peur. C’est qu’on en connaissait, nous, de ces fauchés dans l’entourage de grand-père qui les aidait. Et l’on s’adorait. Et quand il est mort, c’est comme si nous étions liés par un pacte secret d’héritage spirituel. Dès lors je devrais ruser. Pourquoi aurais-je dit : dessinateur sans savoir ce que c’est ? Mais pourquoi pas ? Je n’ai pas attendu longtemps. J’avais grandi sous d’extraordinaires lavis chinois anciens dont l’un, un mendiant qui s’épile, conjugue la pensée, la laideur et la délicatesse virtuose du pinceau. Là réside sûrement mon premier questionnement sur l’art.

 Voilà le décor initial planté.

L’histoire de mes études n’est qu’anecdotique, bien qu’à l’âge où j’ai vécu la guerre et ses suites, pas innocente de ma personnalité. Aux Arts Appliqués, mon professeur de dessin, le grand sculpteur Jacques Swobada me marquera:. Lui seul touchait au spirituel de l’art. Je l’ignorais alors, mais  ce qu’il avait allumé au fond de moi, veillerait et me consumerait un jour.

Si certains artistes ont laissé à l’Histoire des chefs-d’œuvre considérés irremplaçables, n’est-ce pas qu’il existe un Art plus exigeant que le divertissement d’autrui ou son propre plaisir ; une sorte de mystère transcendant, aussi indéfinissable que Dieu ou l’Amour ?

 

  Mon voyage d’études en Italie Ã©branlerait mon rêve  de devenir peintre. J’ai cru m’être parjuré en me résignant au papier peint. Pourtant, je l’ai servi avec cÅ“ur et exigence. Sans frustration ni autre espérance. Au moins 30 ans durant, j’ai ignoré être à la meilleure école.

  Celle de l’humilité : Un trou picard, la betterave pour culture, et la misère de Zola pour outil.

  Celle de l’ambition : Un éditeur-fabricant, historique, détruit par la guerre à la reconquête de sa renommée. Pour patrons, des esthètes familiers de grands peintres et collectionneurs.

   Ecole du langage : l’échange confiant et sensible entre l’artiste et l’ouvrier, ou celui dont le  créateur rejoint les aspirations informulées du peuple. C’est hautement sociologique le papier peint ! Combien ai-je fréquenté de grands talents, et sondé de comportements terre à terre pour créer de vaillants compromis décoratifs conformes à cette éthique :

 Celui qui à été élevé au catalogue Vilmorin et au calendrier des postes, pour toute culture, a droit au même respect esthétique que l’élève de l’école du Louvre.

   Ecole de la relativité : à l’affut de tout ce qui se crée, anticipant l’engouement précurseur de discrédit, la contemporanéité est moins souvent verbe que verbiage. C’est aliénation qu‘être de son époque et si je n’avais fait que de la peinture, je l’aurais été d’une chapelle.

  Côté technique, existe-t-il : plus intransigeante maitrise de l’espace qu’un décor mural continu ? Et de maniement de la couleur plus virtuose que les variantes de coloris autour d’un même modèle textile ou papier peint, (surtout se chiffrant en tonnage à l’usine) ?

  Dans ma fonction observatoire, j’ai dû murir bien d’autres choses insoupçonnées…

Je crois tenir ma singularité picturale du particularisme de mon cheminement initiatique.

Jamais je n’ai cherché l’originalité ; elle devait être en moi. La posture ? Moins encore !

 

Quand je me suis retrouvé libre et des années d’espérance de vie devant moi, je n’avais que mes techniques à parfaire et laisser jaillir ce que j’avais si longtemps contenu.

Une seule difficulté : Me débarrasser des mauvaises habitudes de séduction marchande. 

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